L'Outsider
L'’homme condamné deux ans plus tard à cinq ans de prison dont trois ferme et aux plus lourds dommages-intérêts jamais vus pour un particulier: 4,9 milliards d’euros.
La chaîne hiérarchique de la « SocGen » s’est défendue d’avoir eu connaissance de ces prises de positions risquées. Pourtant, le trader junior avait le vent en poupe. Fin 2007, chiffres à l’appui, il a fait gagner à la Société Générale 1 milliard et demi d’euros sur l’année écoulée. Du jamais vu dans les salles de marchés de la banque à la Défense. A cette époque, Kerviel est dans une spirale de réussite.
On connaît Kerviel… mais on ne sait rien de Jérôme. Personne n’aurait pu prédire que le jeune Breton parviendrait à devenir trader. Jérôme est né en 1977 dans une banale bourgade de pêcheurs du Finistère. Adolescent sans histoire, il mène une vie ordinaire avec son frère et ses parents, un couple uni et travailleur. Il suivra des études convenables qui le mèneront à un DESS de finance. Il est recruté en 2000 par la Société Générale où on l’affecte au « middle office », sorte de secrétariat chargé de comptabiliser les ordres passés par les prestigieux traders qui officient dans la mythique salle des marchés, considérée à l’époque comme la meilleure au monde sur les produits financiers dérivés. Entré par la petite porte, Jérôme Kerviel va gagner ses galons et sa place en apprenant vite. Très vite.
par Marc Flageul
Les réalisations sur la finance et le monde des traders il y en a pléthore. "Wall Street" et sa suite, tous les deux d'Oliver Stone, ou plus récemment "The Big Short". Car il s'agit principalement d'un genre US. D'ailleurs tous ces films n'échappent pas à certaines règles. Le héros se laisse porter par un monde de fric et de plaisirs artificiels, mais au fond de lui il a toujours bon cœur. Il n'hésitera pas à se lever face à ce système pour le pourrir de l'intérieur (à l'instar d'Eddy Murphy dans "Un fauteuil pour deux") ou se rebeller face à un patron, forcement méchant et avide... Ici Barratier refuse ce pathos typiquement américain. Jérôme Kerviel est un personnage en trois dimensions. On se plait à le suivre, à le voir gagner en confiance au fur et à mesure de sa montée des étages de la tour de la Société Générale.
Le personnage a pourtant par bien des aspects un côté désagréable, lorsqu'il rejette ses amis au profit de nouveaux compagnons de route. Mais aussi lorsqu'il se recroqueville devant plus puissant que lui. Ce n'est pas un Robin des Bois français. C'est une tentative de montrer la vérité. Tous ceux qui jouent avec ces chiffres ne sont pas mauvais, ils ne sont pas grandioses non plus. Et là les comédiens sont incroyables. Arthur Dupont campe le héros passant par tant d'émotions que son jeu sera probablement nommé aux prochains César. François-Xavier Demaison est lui un mentor alternant grandiloquence et soirée minables tant sa vie est tournée vers le trading. Et lorsque l'on sait qu'il a par le passé travaillé dans la haute-finance, on imagine bien qu'il en a nourri son jeu. Finalement nous vous conseillons de suivre Sabrina Ouazani, qui joue une employé de la banque avec la tête un peu plus sur les épaules que ceux qui se sont perdus dans les étages supérieurs.
"L'outsider" est un vrai bon thriller français, de ceux qui lorgnent vers le cinéma américain, mais savent montrer une vraie personnalité.
Marc Flageul