sorti le 05/10/2016
"Poesía sin fin", est la suite directe de "La Danza de la Realidad". Dans cette oeuvre sortie en 2012, Alejandro Rodorowsky nous comptait les premières années de sa vie dans un Chili rêvé et familial. Ce nouveau long-métrage prolonge l'histoire, l'autobiographie. Le jeune Alejandrito veut devenir poète... et chez les Jodorowsky ça ne fait pas, c'est même pire qu'une insulte, selon son tyran de père. Un cousin amoureux des arts et de lui, l'amènera à se réaliser, à embrasser son destin.
Poésie, le gros, vilain mot est lâché. L'écriture poétique n'est pas question de métrique, de règles et autres lois. Non c'est l'art de la métaphore, de l'image. Ce disciple de Breton (André) sait très bien ce qu'il fait. Les muses ont les cheveux rouges et des jambes d'arc-en ciel. Les bateaux sont violets et n'existent qu'en quittant le port. Les repères officieux/officiels de poètes ne sont que repères de vieux barbons alcoolisés et fades. Car après tout, comme il le fait dire à Nicanor Parra, plus personne n'achète de livres, encore moins de poésie.
Ces images servent une mise en scène comme seul Jodorowsky sait le faire. Des silhouettes noires actionnent le décor, Les trains modernes sont cachés derrière de grandes photos des michelines de l'époque.
Car s'il s'agit d'autobiographie, il ne faut jamais croire tout ce que dit un poète. A nous de décider ce que nous voulons y voir. Adan, le fils du réalisateur y côtoie son demi-frère Brontis, dans une relation père-fils... compliqué ? pas tant que ça. Alejandro le patriarche du clan, et donc réalisateur de sa propre vie, lie les scènes en venant jouer le narrateur, ou en venant parler à son double de pellicule. Car comme bien souvent le rapport au père est au centre de l'œuvre. Le tuer ou le laisser ? Exister contre ou sans lui ?
Les amateurs du réalisateur de "La montagne sacrée" retrouverons les autres préoccupations de l'artiste, donc attention les corps sont nus, la sexualité existe crue et parfois sale, les êtres ne correspondent pas aux clichés ou aux canons modernes et ce jusque dans leurs excroissances. Alejandro Jodorowsky continue sur sa lancée et exprime ses amours et ses haines dans une première partie. Puis l'art, l'amour de l'art sous toutes ses formes, même les plus extravagantes sera la rédemption de ce héros quasi-byronien.
Marc Flageul