par Marc Flageul
BUMIDOM... qui se souvient de ce sigle ? A moins d'être un passionné de l'histoire de France récente, ou d'avoir été une victime de ce programme, peu de personnes parlent encore de ce projet d'état. L'idée : faire venir les français de ce qui s'appelait encore à l'époque les DOM-TOM en métropole et leur offrir formation et travail. Problème, les autorités voulaient surtout déléguer les tâches les plus ingrates à ses déracinés, qui se trouvaient bien souvent dans des situations de misère sociale.
Jimmy Larivière héros du long-métrage, décide de se tourner vers le vol pour survivre. Puis s'y découvre une conscience politique, une conscience floue qui se définira peu à peu, dans l'opposition et l'acceptation jusqu'à ce que ...
Cette situation, Loïc Lévy l'a vécue, il en a tiré un livre, et Jean-Claude Barny en a à son tour tiré un film. Car il y a de l'autobiographie, ou de l'auto-fiction dirait-on en littérature dans "Le gang des antillais". Film de braqueurs, film politique, film picaresque, ce n'est plus un film de genre, mais un film des genres. Le premier auquel ont pensé tous les journalistes : blaxploitation... Violence, acteurs noirs, années 70... On peut comprendre, mais ce serait un peu trop simple, après tout "Sans arme, ni haine, ni violence" ou "Le dernier gang" partagent beaucoup plus avec "Le gang des antillais" que "Shaft" ou "Brother John". Les deux volets du biopic de Mesrine allant même jusqu'à inclure une conscience politique, qui si elle ne s'attaquait pas aux mêmes travers de la société, n'en dénonçait pas moins les injustices.
Jean-Claude Barny a évidemment ces codes en tête mais sait s'en défaire pour créer une oeuvre de braqueurs sans sombrer dans la violence facile et clinquante. Ce n'est pas ce mode de vie le centre du film. Non c'est la situation de ces expatriés dans leur propre pays. Le spectre large de leurs misères et de leurs solutions, ceux qui acceptèrent et tentèrent, d'autres perdus dans les idéaux ou dans les seringues.
La durée de ce thriller n'est pas très longue et pourtant chaque personnage a le pouvoir de représenter une facette de cette réalité un peu trop facilement oubliée. "Le gang des antillais" est une réalisation que l'on se doit de voir, car malgré son titre et son approche, il sort des sentiers battus.
Marc Flageul