sorti le 09/06/2021
James Wan est probablement le réalisateur qui a marqué l’histoire du cinéma d’horreur au tournant des années 2000. Après la réalisation de Saw (qui deviendra ensuite une des plus longues sagas du genre), il réalise deux films (Dead Silence et Death Sentance) qui lui permettent d’explorer son style horrifique très visuel et d’apprendre à maîtriser sa mise en scène d’une façon surprenante, originale et glaçante. Mais c’est véritablement dans les années 2010 qu’il réalise ces deux diptyques qui comptent incontestablement aujourd’hui parmi les meilleurs films d’horreur de la dernière décennie, si ce n’est de l’histoire du cinéma tout entière.
Insidious sort en 2011 et son Chapitre 2 en 2013, la même année que le premier volet de la saga qui nous intéresse aujourd’hui. Ce diptyque marque par son esthétisation glaçante de l’imagerie horrifique avec des visages simplement maquillés qui choquent et marquent l’esprit par leur simple design. À l’opposé, The Conjuring repose plus classiquement sur une mise en scène travaillant sur les hors champs (zones sombres et hors cadre). Toutefois, l’inventivité de James Wan, sa maîtrise du rythme du montage, du découpage des plans, son utilisation très recherchée des jump scare ainsi que la montée très progressive de l’horreur tout au long du métrage font de ce premier Conjuring un grand succès critique et public. Alors qu’un premier spin-off voit le jour en 2014 (Annabelle, John R. Leonetti), James Wan est de retour derrière la caméra deux ans plus tard pour The Conjuring 2. Livrant un film tout aussi bon si ce n’est meilleur que son prédécesseur, ce long métrage marque par sa manière subtile de mettre en scène tous les éléments propres aux films d’exorcisme mais aussi par un visuel très marquant (la Nonne) qui faisait la force des Insidious. Commencent alors les problèmes.
Entre 2017 et 2019, ce ne sont pas moins de quatre nouveaux spin-off qui voient le jour dans cet univers horrifique. Bien que produit par James Wan, aucun de ces films n’est à la hauteur de son inventivité en matière de peur et d’angoisse. Créateur de multiples univers horrifiques, ceux-ci semblent toujours perdre en qualité dès lors qu’il les confie à d’autres réalisateurs. La saga Saw, qui était à l’origine un thriller horrifique, a rapidement basculé dans le gore et l’hémoglobine à outrance tandis qu’ Insidious est passé d’une horreur visuelle fantastico-satanique à une simple licence à jump scare peu effrayante. Quant à Conjuring, que vaut ce troisième volet ?
Second film de Michael Chaves (qui s’était chargé du spin-off, The Curse of La Llorona), The Conjuring: The Devil Made Me Do It opère un tournant radical de genre par rapport à ses deux aînés. Adoptant les codes du film d’enquête policier avec des éléments paranormaux en bonus, ce troisième volet tranche avec l’habituelle lutte contre un esprit s’attaquant à une famille. Si cela permet d’éviter de tomber dans la redite, le rythme et l’angoisse auxquels James Wan nous avait habitué en sont complètement diminués. Il devient difficile de craindre pour ces personnages qui enquêtent sur des éléments passés, conduisant à chaque scène horrifique de manière très attendue. De plus, là où l’intervention d’esprits maléfiques était évidente dans les premiers volets, le Diable que nous promet le titre n’est en fait qu’un élément mineur de l’intrigue dont l’antagoniste, par sa simple condition humaine, se révèle bien moins effrayante que n’importe quelle entité démoniaque. Enfin, face à un rituel satanique, le pouvoir de l’amour semble être une excuse un peu trop facilement vendue par un pauvre flash-back relatant la rencontre des deux enquêteurs paranormaux, Ed et Lorraine Warren. Ce troisième Conjuring n’est donc pas un mauvais thriller paranormal, mais il souffre tout de même du manque de peur et d’angoisse qui faisaient l’essence de ses prédécesseurs.
Gwendal Ollivier