sorti le 01/02/2023
Après des avant-premières et des premiers retours critique désastreux, Canet est venu pleurer sur les plateaux télé de ses financeurs pour avertir les français. Mais rassurez-vous tout de suite, l’avenir du cinéma ne dépend heureusement pas de ce film entre copains acteurs et caméos de sportifs et de chanteurs. Tentant une énième fois de renouer avec le succès de Mission Cléopâtre d’Alain Chabat, Pathé finance une cinquième adaptation en prise de vue réelle de la bande dessinée de René Goscinny et Albert Uderzo. Malheureusement, n’est pas Chabat qui le veut.
De son point de vue complètement déconnecté de la réalité, Canet nous parle des problématiques qui « hantent » la jeunesse. Dès l’introduction, Astérix joue au végétarien en annonçant ne plus vouloir manger de viande car les légumes sont meilleurs pour la santé. Passant complètement à côté des réelles motivations du véganisme, cette « blague » revient tout au long du film pour se conclure finalement par le retour au statu quo, les deux copains se retrouvant autour d’un sanglier parce que « c’est quand même vachement meilleur que les légumes ! ». De même, le réalisateur nous démontre toute son incompréhension du féminisme avec ses personnages féminins qui revendiquent constamment les droits les plus basiques mais qui sont tout de même réduites à être de bonnes femmes à marier… Un film de boomer persuadé d’être encore parfaitement sur le coup.
Autre sujet clivant, la lutte ouvrière fait l’objet d’un échange entre deux romains (incarnés par McFly et Carlito pour le quota YouTuber), essayant de singer les thématiques de Chabat sans rien comprendre à sa mise en scène et son montage. Sur la même idée que le véganisme, la grève de potion magique d’Astérix dresse un parallèle avec la consommation excessive d’alcool (liquide qui nous aide à nous désinhiber). Mais son discours renvoie aussi à celui des antivax de l’ère covid avec le questionnement sur les « effets secondaires » que pourrait avoir la potion magique sur le long terme : la réponse est simple c’est une potion magique dans une bande dessinée pour enfant. Toujours dans le registre politique, l’immigration est abordée à travers les personnages de Jonathan Cohen et Ramzi qui « viennent du bled » mais se sont teints en blond pour faire « comme les vrais gaulois ». En plus de manquer cruellement de finesse cette série de blagues tombe complètement à l’eau tant la perruque de Cohen est tout aussi criarde que celles d’Astérix et Obélix.
Avec un budget astronomique de 65 millions d’euros, les spectateurs étaient en droit de s’attendre à une qualité visuelle irréprochable. Mais entre le village gaulois en carton regroupant dix maisons qui se battent en duel et les fonds verts mal incrustés des palais chinois, les décors manquent clairement d’audace. Quant aux costumes, tous semblent flambant neuf, sortant tout juste de l’usine de couture de Pathé. Mais comme en témoignent le ventre et les fesses d’Obélix aussi fake que ses imitations maladroites de Depardieu, l’artifice sent à plein nez. Soutenue par une mise en scène et des éclairages dignes de n’importe quel téléfilm, l’histoire ne raconte rien de plus qu’un amalgame des histoires des deux gaulois contre les romains mais avec des chinois en plus. Légèrement plus inspirée, la bande originale de -M- ne se prive pas de reprendre Queen et Ennio Morricone pour rendre des séquences épiques.
Mais tous ces défauts pourraient encore être secondaires si l’humour fonctionnait. Traités comme des enfants de quatre ans, les deux personnages éponymes se font voler la vedette par Jonathan Cohen, en concurrence directe avec Astérix et Vincent Cassel qui liste tous les jeux de mots imaginables autour du prénom de César. Expliquant la moitié des blagues au public trop bête pour les comprendre ou simplement trop grand pour les trouver drôles, Canet s’amuse aussi à reprendre des objets de notre quotidien (pigeon téléphone, parfum Dior, Louboutix, panneau de pub, deux chevaux…). Incarnant un Astérix aigri bien loin du personnage énergique de la BD, Canet fonce tête baissée dans le surjeu total, à l’image de l’ensemble de son casting. Merci tout de même à OrelSan de m’avoir décroché deux sourires sur ces deux longues heures de gêne. Si l’échec de ce métrage empêche de produire à nouveau ce type de film, qu’il en soit ainsi, allez voir d’autres films français en salle car ce nouvel Astérix et Obélix est à mille lieux le pire.
Gwendal Ollivier