1900. De Montmartre à Belleville, Paris est aux mains de gangs ultra violents qui font régner la terreur sur la capitale : les Apaches. Prête à tout pour venger la mort de son frère, une jeune femme intègre un gang. Mais plus elle se rapproche de l'homme qu'elle veut éliminer, plus elle est fascinée par ce dernier.
sorti le 29/03/2023
Avec ce second long métrage, Romain Quirot confirme sa volonté de proposer un cinéma français différent. Après s’être attaqué à la science-fiction dans Le Dernier Voyage sorti en 2020, c’est au tour du film historique romancé de passer sous son style. La capitale dévastée baignée dans la lumière du soleil rouge du premier film laisse cette fois la place à un Paris d’époque crade et malfamé. Mais les couleurs vives sont toujours au rendez-vous. Après un générique en bouts de journaux couverts de coups de crayon, les décors des bars, de l’église et des rues s’habillent d’une esthétique entre le punk et la ruine, entre les couleurs et le terne.
D’entrée de jeu, un long et fluide plan séquence présente un à un les personnages dispersés dans un bar. Le réalisateur joue ainsi avec sa caméra filmant une dispute en champ-contrechamp débullé en caméra portée mais aussi une flopée de plans en longue focale noyant les visages des personnages dans un flou esthétisé par les lumières rouges, vertes ou orangées des décors. Comble de l’envie stylistique, il utilise une double-focale pour réunir la narratrice et son ennemi dans un même cadre avec deux zones de netteté différentes mais conjointes.
Malheureusement, ces efforts visuels sont mis au service d’un scénario éculé qui s'appuie sur deux procédés trop littéraires : la voix-off et le découpage en chapitres. En ressort une impression que le réalisateur n'a ni confiance en sa mise en scène ni au jeu de son actrice principale. Et pourtant, Alice Isaaz s’en sort à merveille et parvient à faire ressentir les conflits internes de son personnage débités tout haut par la voix-off. Le découpage en sept chapitres s’inscrit quant à lui dans un problème de rythme plus général. Car malgré une réalisation audacieuse, le manque de budget se ressent rapidement dans l’économie des décors et la propreté des costumes.
Pourtant, l’écriture et la direction artistique ne manquent pas de bonnes idées. L’uchronie et les anachronismes en sont deux bons exemples. Dans un monde où la Statue de la Liberté en chantier à Paris peut s’effondrer, nous comprenons que le réalisateur va construire sa propre capitale du début du 20e. Dès lors, la façon dont les personnages se filment sans cesse avec des caméras argentiques en soirée ou pendant leurs coups comme nous utiliserions nos portables apporte une proximité plus intime avec ces personnages qui ne respectent en rien le ton de l’époque dans laquelle ils évoluent. Pour accompagner cette démarche anachronique, la musique tantôt rock tantôt électro sublime plus d’une séquence en iconisant férocement cette bande d’apaches.
Gwendal Ollivier