Du Louvre au Palais de Buckingham, des bas-fonds de Paris au siège de La Rochelle… dans un Royaume divisé par les guerres de religion et menacé d’invasion par l’Angleterre, une poignée d’hommes et de femmes vont croiser leurs épées et lier leur destin à celui de la France.
Constance Bonacieux est enlevée sous les yeux de D'Artagnan. Dans une quête effrénée pour la sauver, le jeune mousquetaire est contraint de s'allier à la mystérieuse Milady de Winter. Alors que la guerre est déclarée, Athos, Porthos et Aramis ont déjà rejoint le front. Par ailleurs, un terrible secret du passé va briser toutes les anciennes alliances.
sorti le 13/12/2023
Huit mois après la première partie, Martin Bourboulon conclue son diptyque ambitieux en lorgnant maladroitement vers la série télé. Débutant son film par un montage récap entrecoupé de textes explicatifs redondants, le ton d’épisode filer est posé alors que le réalisateur s’éloigne des enjeux politiques pour s’intéresser à la sous-intrigue qui faisait office de cliffhanger : l’enlèvement de Constance Bonacieux.
Toujours aussi morne que celui de la première partie, l’étalonnage terne oscille entre du beige pâle, du marron bouché, de l’orange pas assez vif pour du feu, et du bleu grisâtre qui peine à donner l’illusion de la nuit. Des mousquetaires parés de rouges et de blanc, le réalisateur retient au moins le rouge pour son début de film avant de retomber dans leurs habituelles tenues délabrées, qui ne représentent en rien l’héroïsme de leur titre. Dans leur ensemble, les costumes restent cependant convainquant et, alliés à la diversité des décors, nous plongent aisément dans cette époque de cape et d’épée. Malheureusement gâchés par la brume, les décors sont victimes du manque de contraste, en particulier dans les scènes de combat.
Toujours trop proche des personnages la caméra bondit sur l’épaule du cadreur à chaque nouvelle scène d’action comme si le réalisateur ne connaissait aucun autre moyen de retranscrire l’énergie d’un combat à l’épée. L’échelle de plan trop serrée couplée aux couleurs ternes et au surplus de mouvement noie les plans séquences dans un flou constant qui empêche de comprendre l’action. Malgré la proximité entre corps et caméra, on ne réussit jamais à percevoir les émotions ou pensées des personnages pendant les affrontements car le réalisateur ne s’attarde jamais sur leur visage. Par cette réalisation hasardeuse systématique, Bourboulon semble oublier que les séquences de combats ne sont pas des attractions mais des moments de narrations visuels dans lesquels les personnages se dévoilent.
Dans un souci de progressisme, le scénario transforme la manipulatrice qui donne son nom à cette deuxième partie en combattante hors pair mais prend aussi des libertés incohérentes par rapport à l’époque du récit. Si le choix de casting de Lyna Khoudri en femme de proximité de la reine était déjà questionnable, il est étrange de retrouver un homme noir dans les rangs des mousquetaires, aussitôt justifié par un dialogue. Des dialogues d’ailleurs à double tranchant car si Vincent Cassel ou Eva Green ont l’aura et le talent nécessaire pour déclamer des lignes de Dumas, le jeu de François Civil alterne entre de la récitation de poème et son naturel habituel, ici inapproprié. Plus présent que dans la partie une, Pio Marmaï et Romain Duris servent uniquement de levier humoristique, empiétant sur le Roi Louis Garrel XIII, moins présent dans cette suite mais toujours aussi drôle dans sa naïveté masquée par une assurance affirmée.
[SPOILERS]
Absente de la majorité du métrage et pourtant au cœur du récit, Constance Bonacieux écrase tous les enjeux. Avec les promesses de conflit de la première partie, on était en droit de s’attendre à un dénouement épique dans le sang et les larmes. Toutefois, hormis les trop nombreux combats illisibles des mousquetaires, le contexte politique devient la toile de fond et la recherche de Constance la quête principale. Hélas même en occupant le cœur narratif et émotionnel du film, la fin ne parvient pas à émouvoir par son manque de crédibilité. Après s’être fait briser la nuque par la corde d’une potence, étonnant de voir Constance se réveiller pour toucher quelques mots finaux à son bien-aimé.
Potentiel manqué de cette seconde partie qui porte pourtant son nom, le personnage d’Eva Green n’est pas plus présent que dans la première partie et demeure cette femme mystérieuse aux intentions floues. Entre son jeu de séduction avec D’Artagnan, et son passé avec Athos, l’anti-héroïne avait pourtant de quoi porter le film sur ses épaules en bouleversant complètement les relations entre les mousquetaires et en menant à bien ses manipulations politiques. Malheureusement, tous les enjeux de la première partie se concluent lors du jugement du capitaine, sans aucun souffle épique, un véritable pétard mouillé couvert par l’humour et la promesse d’une suite. Vendu depuis le départ comme un diptyque, la fin ouverte laisse la possibilité de produire un troisième volet ou d’adapter les deux autres livres de la trilogie de Dumas. Déjà en préparation par la même équipe de production et de scénariste, Le Comte de Monte-Cristo avec Pierre Niney dans le rôle-titre a de quoi inquiéter. Espérons seulement que l’équipe saura livrer un scénario à la hauteur de ses ambitions et ne pas reproduire les défauts esthétiques de Milady et ses trois mousquetaires.
Gwendal Ollivier