sorti le 28/06/2024
Jeune marin courageux, Edmond Dantès devient l’objet d’un complot alors qu’il éveille la jalousie de son capitaine en sauvant une femme de la noyade. Arrêté le jour de son mariage pour un crime qu’il n’a pas commis, il est envoyé au château d'If pour croupir en attendant sa vengeance. Véritable fresque d’une vie, les trois heures de film sont denses mais jamais ennuyeuses. Ne souffrant d’aucun temps mort, la narration s’étale sur des années, marquée par des ellipses qui permettent d’accepter l’évolution des situations de chacun des personnages, en particulier d’Edmond et rendent sa quête d’autant plus satisfaisante et cathartique pour le spectateur.
Dès la scène d’introduction, la réalisation et les effets spéciaux invisibles nous immergent au cœur d’une tempête et construisent un point d’ancrage héroïque comme première action du futur anti-héros. Des plans larges sur le port de Marseille et ses bateaux à perte de vue aux intérieurs magnifiquement détaillés des châteaux du Comte et de ses ennemis, les décors regorgent d’une richesse réaliste. Mise en lumière par un étalonnage aux couleurs vibrantes, l’esthétique du métrage évoque celle d’un conte mais donne surtout un cachet indéniable au film. En dehors du duel à l’épée qui lorgne dangereusement du côté des défauts de mise en scène des Trois Mousquetaires, la réalisation fait vraiment honneur au roman. Posant des cadres amples sur les personnages pour les inclure au sein des décors, les deux réalisateurs utilisent de nombreux plans grue ou au drone pour magnifier les environnements, la dureté d’une fatalité et l’importance d’une découverte.
Aussi lyrique qu’épique, la musique prend une place importante dans l’espace sonore du film. Compositeur fidèle des deux réalisateurs, Jérôme Rebotier sort du registre de la comédie pour s’amuser avec l’orchestre, ses cordes frottées émotionnelles, ses flûtes douces, ses percussions épiques et ses cuivres solennels. Alors que le thème d’Haydée à la guitare et au chant apporte une atmosphère envoutante à sa première scène dans le château du Comte, le thème principal (Le Trésor) sublime les révélations et les actions du personnage principal par sa mise en avant explosive dans le mixage.
Côté casting, Anaïs Demoustier (Mercédès) et Vassili Schneider (Albert) incarnent les deux versants du grand amour, celui naissant face à celui rendu impossible par le temps. Comme à son habitude, Laurent Lafitte est excellent, incarnant avec justesse les faux-semblants, le paraître et la fausse bonté du procureur Gérard de Villefort. Si Bastien Bouillon (Fernand) livre une performance en deçà du reste du casting, Patrick Mille (Danglars) parvient parfaitement à rendre son personnage délicieusement détestable. Mais ce sont surtout les jeunes Anamaria Vartolomei (révélée en 2021 par L’Évènement) et Julien De Saint Jean qui apportent une lumière puissante à toute la seconde moitié du métrage en tant que complice du héros de cette histoire.
Débutant sur une note commune au sein de sa palette de jeu, Pierre Niney abandonne rapidement son rôle d’amoureux naïf pour s’effacer derrière le maquillage irréprochable du masque. Jouant avec élégance, il saisit parfaitement la richesse de son personnage, aussi bien dans sa posture que dans les émotions contraires qui l’habitent, dominé par la quête obsessionnelle de vengeance. Aussi à l’aise dans le maniement d’un français très littéraire que dans celui des multiples langues parlées par son personnage dont il copie l’accent avec précision, l’investissement de Niney se ressent véritablement. Personnage central du récit, l’acteur pourtant connu de tous parvient l’exploit de nous faire oublier qu’il se cache sous le masque du Comte de Monte-Cristo.
Gwendal Ollivier