par Coraline Lafon
Depuis sa Palme d'or au Festival de Cannes 2012, ce bijou du 7ème Art a été récompensé par plus de vingt prix. Vous l’aurez compris, « Amour » ne laisse personne indifférent. Et pour cause, ce long-métrage dramatique perturbe, et nous confronte à des problématiques humaines inéluctables, le tout parfaitement interprété et mis en scène.
Le réalisateur autrichien Michael Haneke (dont c’est la seconde Palme d’or) nous dépeint une façon d’aimer que nous oublions parfois, à force de films hollywoodiens et de contes de fées. L’Amour qui unit ce vieux couple est quotidien, profondément intime, renforcé par les années, fragilisé par les épreuves, parfois maladroit et triste, parfois complice et touchant. Et qu’il est bon parfois de se souvenir que lorsque l’on aime, c’est pour le pire et le meilleur : quand Georges aide Anne à se lever du siège des toilettes, ou quand le couple partage, malgré l’épée de Damoclès au dessus de sa tête, des instants de complicité, on sait qu’on assiste à un Amour qui dépasse les clichés des fictions.
Le tournage en huis-clos renforce le côté intimiste de la relation mais provoque également un certain malaise : on se sent cloisonné avec les protagonistes dans cet espace sombre et routinier qui ne fait plus parti du monde réel. Le fait que très peu de personnages extérieurs interviennent tout au long des deux heures de projection est assez révélateur de ce décalage avec la réalité. De même, quand Eva, au chevet de sa mère malade, parle du prix de l’immobilier aujourd’hui, on a le sentiment que ses préoccupations ne sont pas du même monde.
Le rythme du montage peut surprendre : beaucoup de plans fixes, de silences, de longueurs, typique du réalisateur, et cela peut devenir déconcertant, voire frustrant. Le choix de ce tempo associé aux thèmes de la vieillesse, de la mort et de la solitude est pertinent mais accentue le malaise du spectateur. Cette oeuvre dérange, nous confronte à la souffrance et la fin de vie de ceux qui nous sont chers. « Amour » irrite, touche, gêne. On ne sort pas du visionnage indemne.
Golden Globe 2013 du meilleur film étranger, deuxième long métrage à gagner les cinq César les plus prestigieux (meilleur film, réalisateur, acteur, actrice, scénario), quatre European Film Awards en 2012 (meilleurs film, réalisateur, acteur, actrice) et l’Oscar 2013 du meilleur film étranger.
Amour, le vrai, avec un grand A, pour le pire et le meilleur, la vraie vie finalement.
Coraline Lafon